La transformation digitale, le lien social et le rapport au temps
Pour que la transformation digitale s'opère réellement, il me parait indispensable que chacun comprennent les enjeux humains.
Ces enjeux ne sont pas d'être plus efficace, de bien utiliser les outils, de mieux mesurer la performance, de délivrer plus vite un produit, etc. Non, ça c'est l'enjeu économique et ce n'est pas mon propos.
Pour l'humain, l'enjeu essentiel c'est que le digital change deux éléments fondamentaux pour un être vivant en société : le lien aux autres et le rapport au temps.
Le lien aux autres
Parce-que le digital redessine la relation : synchrone ou/et asynchrone. C'est dans le "et/ou" que se cache la transformation. Avant, nous étions soit l'un, soit l'autre. On écrivait une lettre OU on parlait avec quelqu'un. Aujourd'hui, on est présent sur whatsapp en synchrone/asynchrone ET on parle à quelqu'un.
Il est indispensable d'expliquer que ce lien ne se vit pas pareil s'il est à distance ou en réel. S'il est au présent ou en différé. S'il est présent sans être présent (répondre à ses emails en réunion...).
Pour un être social, la présence est cruciale.
Un professeur d'université me rapportait il y a peu, que le distanciel fonctionne mieux si les gens se sont vus au moins une fois avant de commencer le parcours de formation à distance. Ils se connaissent, ont échangé, la suite de la relation peut s'engager. Il y a donc bien toujours ce besoin de présence ET une relation qui peut exister et se construire sans présence physique.
Le rapport au temps
Le synchrone / asynchrone balaie la notion de temps. Je suis partout, tout le temps. Je réagis à tout. Il faut être dans tous les présents (celui de l'entreprise, celui de la famille, celui des amis...) et anticiper les futurs complexes et incertains... Le digital donne l'accès aux ressources, aux autres, mais il ne permet pas de réfléchir. La réflexion nécessite du temps, indispensable, pour élaborer la pensée. Ce temps... où l'on s'ennuie, où le cerveau travaille insconciemment pour assimiler, faire les liens et aboutir à une pensée. Ce temps est impossible quand on est hyper-connecté. Puisque le cerveau est sollicité sans cesse sur pluieurs tâches (réserver un train, consulter les réseaux sociaux...).
Les neuroscientifiques ont montré que le cerveau s'emballe et finit en burn out à cause du trop plein d'informations générées par le digital.
Ce temps accéléré, surchargé doit être revu: nous devons prendre un peu de recul pour vivre dans un nouveau rapport au temps si nous voulons éviter de brûler littéralement nos cerveaux.
Expliquer pour ne pas subir
Si nous n'expliquons pas ce que change le digital à nos vies humaines et comment s'en passer, nous ne remplissons pas notre mission de transformation. Il ne suffit pas de transmettre les usages du digital. Il est indispensable d'apprendre à gérer sa relation avec le digital. Chez les jeunes, une expression pointe son nez depuis peu : il traite certaines personnes de "no-life". Qu'est-ce que c'est ? Ce sont des gens qui ne font que travailler et être connecté. Ils sont perspicaces les jeunes, non ?!:-)
Le droit à la déconnexion, n'est donc pas un seulement un droit à la tranquilité, mais un droit à la nécessité d'être en lien avec autrui et un droit à prendre du temps pour se mettre en capacité de réfléchir et d'agir autrement. Parce-que nous sommes des animaux sociaux et que pour notre bien-être, les échanges de visu sont indispensables.
La culture digitale c'est savoir utiliser mais aussi de savoir se passer du digital. Pour mieux réfléchir, échanger avec les autres et finalement agir comme un être humain bien vivant. C'est à nous d'inventer la vie qui va avec le digital, prenons juste conscience que nous devons expérimenter cette nouvelle vie plutôt que de s'y engouffrer et de la subir.
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